Tout dépend de comment on définit le succès

Le succès de votre livre dépend de facteurs que vous contrôlez, jusqu’à un point.

Coucher une histoire sur le papier dans son intégralité, exprimer des idées avec des mots exquis, précis, pour créer une ambiance, ménager le suspense, susciter un intérêt croissant au fil de la lecture ; satisfaire la curiosité des lecteurs avec une intrigue soigneusement construite jusqu’à son dénouement, sont pour moi les éléments visibles d’un travail soutenu, accompli avec intelligence, et le succès commence là. Réussir, c’est aller jusqu’au bout de ce qu’on entreprend.  

Il n’y a jamais eu autant de livres sur le marché pour aussi peu d’acheteurs ni autant de frustration chez les conteurs d’histoire. Si le cœur leur en dit, les lecteurs ont le droit d’ignorer notre travail. Ils ne doivent rien aux auteurs, ni validation ni reconnaissance, ou acclamation. Leur tenir rigueur est une perte de temps. Entre nous autres auteurs, nous faisons la même chose. Nous ignorons sciemment les talents qui bourgeonnent dans notre environnement.

Faire connaître son travail et le commercialiser demande des connaissances et des compétences que peu d’auteurs possèdent, mais que les indépendants doivent développer un tant soit peu s’ils souhaitent échapper au désarroi et au sentiment de solitude qui caractérisent cette étape de leur aventure littéraire. Pour la plupart, nous sommes des auteurs et non des spécialistes du marketing. De nos jours, peu d’éditeurs peuvent garantir les ventes, et l’auteur se retrouve à devoir retrousser ses manches s’il désire susciter de l’intérêt pour son livre.   

Les médias sociaux tels que Facebook, Twitter, Instagram et LinkedIn sont des plateformes utiles pour interagir avec le public et créer une communauté qui commentera nos posts et, avec un peu de chance, donnera un feedback sincère. Mais, soyons honnêtes, il faut déjà être connu pour susciter un tel engouement. Pour moi, la vente est un sport de contact. Je ne vends jamais autant que quand rempli de gratitude, je vais à la rencontre de mes lecteurs.

Le livre, un objet incontournable pour le théâtre, le cinéma, l’enseignement, l’éducation, et tout programme de développement, demeure le parent pauvre de la culture. La scène littéraire locale ressemble à un bourbier où les aspirations des nouveaux écrivains viennent s’éteindre. Croire en eux et leur donner leur chance sont un risque que seuls les plus curieux sont prêts à prendre en leur achetant un ouvrage, s’ils font le déplacement.   

La lecture crée des liens, les liens sociaux indispensables à une société plus harmonieuse, plus ouverte, plus libre. Elle nous relie à nous-mêmes, aux autres et au monde, au passé, au présent et à l’avenir. Elle permet de se projeter, de choisir sa route, d’envisager demain de faire corps, ensemble.

Le manque d’accès au livre constitue une forme de violence qui fragmente la société, et la fragilise. La lecture est nécessaire pour se construire, pour être libre et autonome. Le droit à la lecture ouvre une porte pour tous les autres droits.

La lecture est un sésame. Elle enseigne, informe, transmet, oriente, éveille l’imagination, cultive l’esprit critique, bouscule nos conceptions, interroge la réalité, se partage… Elle abrite, répare, nourrit, emmène plus loin, et fait grandir. La lecture est un ferment du développement.

Le lecteur est un agent essentiel dans la chaîne du livre. C’est lui qui interprète le texte, lui donne vie et le fait vivre. Ce qu’il veut, il l’obtient. Sans lui, tout stagne et rien ne se produit. C’est pour lui qu’écrivains, éditeurs, imprimeurs, distributeurs, diffuseurs, et libraires se mettent en branle.

Comment peut-il soutenir les auteurs ? En donnant leur chance au moins connus, en achetant leurs livres, en donnant son avis sur ses lectures, en parlant de ses lectures autour de lui, en laissant un commentaire constructif en ligne, en communiquant avec l’auteur, en prêtant, en offrant des livres à ceux qu’il aime pour les fêtes…

Que peut-on faire pour aiguiser notre regard, changer notre approche vis-à-vis du livre, de tous les livres, ceux qui ont reçu l’onction d’une grande maison d’édition comme les autres qui certainement ont également quelque chose d’important à dire ?