
Il est charmant et généreux quand il ne nous gueule pas dessus. La plupart du temps, il est toxique, se place souvent au-dessus des lois et des règles de la bienséance, et est rarement de bonne humeur. On entend que lui au bureau. Devant ses sautes d’humeur, nous nous contentons de baisser les yeux et puis la tête quand il nous parle, et d’attendre patiemment que la tempête passe. Dans ces conditions-là, une seule chose compte, que l’aiguille de l’horloge défile plus vite et qu’il soit l’heure de rentrer. Une fois que nous atteignons nos objectifs, il nous en donne d’autres encore plus durs. Quoique l’on fasse, ce n’est jamais assez. C’est insupportable à la longue.
Je crois que le patron ne pense qu’à lui et à ses propres besoins. Rien d’autre n’est important. Monsieur sait tout, voit tout, fait tout. Il fait comme s’il n’a pas besoin de nous, pourtant, c’est nous qui faisons tourner sa boîte. Je comprends que ce n’est pas une démocratie s’il en est le propriétaire, mais quand même !
Peut-être croit-il que pour que nous travaillions, il doit nous contrôler. Ou que nous sommes des fainéants et seul le fouet nous activera. Ou encore que sans lui rien ne se passerait ici. Il gueule sûrement parce qu’autrement, rien en nous ne fera tilt. Nous sommes des demeurés. Clairement, seuls, quelques-uns parmi nous valent la peine d’être écoutés.
Pas étonnant qu’il soit tout le temps fâché et sur les nerfs. Et le COVID n’arrange en rien l’affaire. C’est à peine s’il dit bonjour le matin. Dans son dos, certains disent qu’il est narcissique, arrogant, névrosé, et n’a aucune jugeote. Je suis plutôt d’accord, mais je ne dis rien. Comme ça, on ne pourra pas m’accuser de faire des commérages.
Personne n’ose rien lui dire en face. Nous avons tous beaucoup de factures à payer ; et les patrons, il y en a peu qui fonctionnent autrement. Donc nous nous adaptons au monde malade qu’ils créent pour nous. Personnellement, je ne prends pas leurs comportements au sérieux. Je crois qu’ils ont très peur, de perdre la face, de manquer d’autorité, de ne pas savoir ce qu’ils font, d’échouer, de ne pas faire leurs chiffres, et nous payons les pots cassés. En vérité, ils manquent de psychologie et d’influence, et agissent comme des brutes en désespoir de cause. Quelqu’un devrait les former. Moi, je dis que ça ne sert à rien de chercher à les apaiser. Ça revient même un peu à attiser leur appétit insatiable pour la négativité. Ça ne sert à rien non plus d’essayer de les aider à changer. Ils changeront quand ce qu’ils font ne marchera plus pour eux. Mais si ça marche, c’est peut-être parce que nos réactions, celles de mes collègues et moi, notre déférence et notre conditionnement de peureux encouragent leurs abus.
Ça ne sert à rien de se disputer avec eux, sauf si l’on veut perdre son travail. Moi, je dis aux gens qu’il ne faut pas résister. Laisser les faire ce qu’ils veulent, détruire les chances d’une bonne entente et coopération dans leurs équipes. Changez vos réponses à leurs mauvais comportements. Leur échec démontrera leur incompétence.
L’important, c’est de se faire respecter. Quand mon patron me fait des reproches, je me tiens au garde-à-vous devant lui. C’est ce qu’il aime. Je me mets à respirer fort pour aérer mon cerveau (ça m’empêche de péter un plomb.), et je le regarde dans les yeux avec tendresse comme on regarde un bébé qui fait des siennes, l’air de dire, « ce que vous me dites-la est fascinant. » S’il hausse le ton, je lève les bras au ciel comme si je me rendais. S’il n’arrête pas, alors je répète son nom comme si j’étais un disque rayé, et puis immanquablement, il arrête de vociférer : « Quoi, quoi ? » et là, je lui réponds à voix basse : « Monsieur, je vous entends mieux sans toutes les émotions. Que disiez-vous au juste ? » À ce moment-là, il met fin à son monologue et me tourne le dos. Et moi, je passe faire un tour au WC pour un petit pipi. Mon patron est toxique, j’adore le détester.Et vous, vous faites comment ?
EXERCICE D’ÉCRITURE
N.B. Je n’ai pas de patron, c’était un exercice, rien de plus. Je travaille à mon compte.
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